Dans un rapport présenté en Février 2022 au Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation et intitulé : « Sensibiliser et former aux enjeux de la transition écologique et du développement durable dans l’enseignement supérieur », quelques objectifs principaux étaient mis en avant :

  • Faire évoluer toutes les formations de l’enseignement supérieur
  • Accélérer et renforcer l’implication des établissements d’Enseignement supérieur
  • Favoriser la mobilisation des personnels du supérieur
  • Favoriser la mobilisation des apprenants

En ce qui concerne les apprenants, on ne peut que constater que le mouvement est bien lancé.

Mais depuis 2019, prenant la suite d’une intervention remarquée des diplômés de l’école Polytechnique, de nombreux étudiants ont pris la parole, se sont regroupés pour inviter leurs camarades à faire bouger les lignes rapidement. Il ne s’agit pas encore de révolution totale du système comme le souhaite l’astrophysicien Aurélien Barreau, qui interpella les participants de l’université d’été 2022 du MEDEF en déclarant « nous ne sommes pas la solution, nous sommes le problème ». Pour autant, poser la question posée en ces termes : « Comment se fait-il qu’une école aussi généraliste que Polytechnique n’inclut aucun cours sur le développement durable dans son tronc commun, alors que, il faut le répéter c’est le défi principal de notre temps ? » a marqué les esprits.

Les mêmes étudiants se sont par la suite engagés à ne travailler « que dans des entreprises qui ont déjà initié ces changements ou qui sont prêtes à remettre en cause leur modèle de développement ». On retrouve dans le discours de Anne-Gaëlle Goll lors de la remise des diplômes d’HEC pour les promos H20 et H21, un même engagement et une question identique : « Dans les prochaines décennies de nos vies professionnelles, nous avons l’opportunité de marquer l’histoire, d’arrêter de perpétuer un système financier et commercial qui consomme largement plus que les ressources de la planète, qui va affecter l’humanité pour des siècles. Mais comment pourrions-nous aller au bout de notre engagement, lorsque le nom même d’HEC est l’incarnation du pouvoir dans le système actuel ? ».

Le manifeste « Pour un réveil écologique de l’action publique » publié en juin 2022, a été signé par quelques 33 000 étudiants en France. Il est assorti de 27 propositions à destination du Président de la République, de la Première ministre, de la ministre de la transition écologique et du ministre de la transformation et de la fonction publiques. On ne peut plus douter du sérieux de notre jeunesse, ni de l’urgence qu’il y a à lui proposer du concret rapidement.

La mobilisation est générale.

On le constatera en lisant la réponse fournie par le MESRI qui, en substance, précise la mobilisation de la Direction Générale de la Recherche et de l’Innovation en direction de ce changement majeur d’orientation : « Les secteurs scientifiques de la DGRI participent à la préparation, à la mise en œuvre (à travers les établissements d’enseignement supérieur et de recherche) puis à l’évaluation des stratégies nationales environnementales (SNBC,PPE, SNB, Plans nationaux Ecophyto et Santé-Environnement, etc.). L’apport principal de la DGRI est la mobilisation, la structuration et l’apport de moyens aux équipes de recherche des organismes, universités et entreprises travaillant sur ces problématiques. »

Plus concrètement encore, les incitations et les mesures de contrôle du respect de cette nouvelle ligne responsable se traduit par des consignes claires à respecter par tous les établissements qui en appellent à leur ministère de tutelle pour conduire la transformation. Ainsi peut-on apprécier : « Il faut noter également que dans les appels à projets du PIA4, et notamment dans ceux liés aux stratégies d’accélération, il est désormais systématiquement inclus un paragraphe sur le principe DNSH, rédigé ainsi : « les projets causant un préjudice important du point de vue de l’environnement seront exclus (application du principe DNSH-Do not Significant Harm ou « absence de préjudice important »). Les projets devront le cas échéant justifier la neutralité pour l’environnement des applications de la solution proposée et/ou s’inscrire dans une démarche d’amélioration vis-à-vis d’une solution de référence ».

« Tous sensibilisés », semble être un mot d’ordre qui parcourt les établissements du supérieur à tous les niveaux et qui devraient en conséquence, inspirer les prochaines stratégies de développement. Campus vert, optimisation des ressources, digitalisation responsable des moyens pédagogiques, formations des enseignants et des personnels administratifs, tout devrait s’accélérer pour contribuer à l’objectif d’une Nation.

Mais qu’en est-il des formations ? Ont-elles toutes intégré, désormais, cette sensibilisation à la transition écologique ? Et quels sont les établissements les plus engagés sur cette voie ?

De nombreux établissements pourraient être cités en exemple pour montrer à quel point la mobilisation est générale.
En voici trois qui peuvent nous inspirer :

Ainsi l’Université Paris 8 Vincennes – Saint-Denis s’engage, au-delà de la responsabilité sociale et notamment l’inclusion et le respect de la diversité des publics, dans une politique de responsabilité. Le projet de l’université vise « la préservation et construction de notre environnement en continuité avec les démarches déjà entreprises dans le cadre de la charge de mission “Développement durable et Responsabilité sociétale”, le Schéma directeur énergie-eau, et la participation au projet Critical Edge Alliance, en priorisant l’amélioration de la gestion de l’énergie en cohérence avec les objectifs fixés dans la loi ELAN. »

Autre exemple à Strasbourg, où est né en 2020 le projet d’une faculté de Lettres responsable, sous l’impulsion des enseignants. De nombreuses initiatives ont déjà vu le jour, au-delà de la communication autour des deux enjeux majeurs retenus :  le harcèlement sexuel et sexiste à l’université, et le développement durable au sein de la Faculté des lettres. Ateliers « fresque du climat », nudges incitant à la réflexion dans les bâtiments, calendrier participatif, etc…

Aussi, rappelons l’importance du label DDRS que certaines universités ont déjà reçu comme c’est le cas à Poitiers. En effet, dès 2016, l’université était l’une des deux premières universités françaises reconnues par l’obtention du label DDRS (Développement Durable et Responsabilité Sociétale). Ce label ne reconnait pas seulement des résultats déjà importants à Poitiers mais atteste de la sincérité d’une démarche inscrite dans un processus d’amélioration continue vers un « éco-campus favorisant la biodiversité sur les campus, la réduction des consommations d’énergie, le développement des mobilités douces, une stratégie « zéro déchet ».

Par ailleurs, de très nombreuses universités ont déjà inscrit à leur catalogue des formations axées sur le développement durable, et ce à différents niveaux couvrant le B.U.T, la Licence ou les Masters. Certaines vont plus loin dans l’adaptation au monde de demain comme à Sorbonne Université où l’on propose une formation en santé dont « l’objectif est de former les professionnels de santé et administratifs aux bases théoriques de l’impact du changement climatique sur la santé des populations et sur les établissements de santé ».

On le constatera facilement, si les étudiants ont fait leur « coming out » et ont ouvert la voie à un changement en profondeur des engagements des établissements d’enseignement supérieur, ceux-ci ont vivement réagi et sont, pour la plupart, entrés dans une phase de mutation profonde. Outre que les outils numériques peuvent contribuer à une gouvernance plus responsable, il apparait que les universités et les grandes écoles impliquent également tous les acteurs (personnels, enseignants et apprenants) dans ce changement de mentalité et d’attitude. Chacun est responsable ou doit le devenir rapidement en écho à l’appel Pour un réveil écologique.

On retrouve d’ailleurs, dans le rapport Jouzel remis au MESRI en février dernier, quelques pistes de réflexion et d’actions qui peuvent être utiles à toutes celles et ceux qui s’engagent pour un futur responsable.

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