Le printemps venait de sonner et la Lorraine accueillait les plus beaux projets de transformation des établissements universitaires français. Comme pour mieux souligner la diversité des contextes et des perspectives d’avenir, étaient conviés, en nombre, des personnalités impliquées de nos institutions et des représentants de la gouvernance des universités. Toute une journée, ne suffirait pas à explorer l’immensité des situations, mais l’objectif de Nadia Jacoby, notre fondatrice et dirigeante, était bien d’animer les débats et de solliciter un partage de vision stratégique et de bonnes pratiques, de nature à propager une dynamique positive.

Car si PLEIADES* est un projet porté par l’Université de Lorraine, lauréat de l’AMI de DemoES, c’est surtout une véritable Odyssée. A mi-parcours, Hélène Boulanger, la présidente de l’Université de Lorraine, souhaitait en effet, porter à la connaissance du monde universitaire, l’avancement et les premiers résultats de cette ambition. Aux côtés de Thierry Cachot, Responsable Scientifique et porteur du projet PLEIADES, la Présidente explique en préambule pourquoi et comment cette Odyssée numérique permettra de réinventer les apprentissages. Ainsi il est rappelé aux participants qu’il s’agit « d’une transformation en profondeur que le numérique engendre et qu’elle concerne les 250 métiers recensés au sein de l’Université de Lorraine, incluant les enseignants chercheurs mais également tous les autres acteurs de notre quotidien. » Une Odyssée qui entend améliorer l’expérience des étudiants mais qui aura un impact sur l’ensemble de la société. Une Odyssée qui veut « sortir du débat polarisé sur le numérique et s’inscrire dans le « faire » avec une approche globale, sans laisser de question de côté et en essayant de traiter toutes les dimensions de la transformation en profondeur de l’enseignement supérieur ».

Une volonté d’élargir le débat qui s’illustre parfaitement dans l’enjeu, dans la mission originelle d’inclusion que porte l’université, ainsi que le précisera plus tard dans la journée, Oliver Wong, pilote du groupe interDemoES « Stratégies et pilotage de la transformation numérique », Responsable Scientifique du projet DemoES AIR et Vice-Président Numérique de l’Université de Rennes.

Une volonté de débattre au sein de l’université avec toutes les parties prenantes, comme en témoigne la diversité des intervenants conviés et qui répondront avec passion aux questions les plus pointues, sans éluder celles d’un public particulièrement attentif.

Quels sont les enjeux principaux rencontrés par les établissements lors de la mise en place de projets de transformations, comme PLEIADES ou d’autres DemoES ?

Dans un format table ronde, les intervenants exposent naturellement des points de vue complémentaires, et explorent ainsi la profondeur du sujet. C’est ainsi que les interventions successives de, Valérie Rault, Vice-Présidente en charge de l’accompagnement et du développement de la pédagogie de l’Université de Lorraine, Pierre Boulet, Président de l’association VP Num et Vice-Président Numérique de l’Université de Lille, Luc Massou, Conseiller scientifique et pédagogique MESR et d’Olivier Wong, ont éclairés les défis qui attendent l’ensemble des acteurs.

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Crédit photo : Université de Lorraine

Ainsi, Luc Massou invoque « la question de l’accompagnement des acteurs de terrain, notamment la problématique des personnels d’appui, aux statuts parfois précaires, qui revient systématiquement dans les bilans ». A cet impératif de gestion des ressources humaines s’ajoutent des sujets de « transversalité » et de « passage à l’échelle » qui peuvent également mettre en difficulté les équipes projets. « Quand on est VP numérique ou directeur du numérique, on reçoit des demandes de partout : de la formation, d’une composante particulière, des services centraux, d’un laboratoire de recherche, etc. Avec des moyens limités, il faut forcément arbitrer, et surtout construire une stratégie », affirme quant à lui, Pierre Boulet. Il est rejoint sur cette nécessité d’une réelle adéquation entre la stratégie globale de l’établissement et celle du projet par Olivier Wong mais aussi par Valérie Rault, qui précise que l’Université de Lorraine fait très attention « que ce soit dans le cadre du projet DemoES PLEIADES ou d’autres projets dans le cadre de France 2030, à ne pas faire de mille- feuilles ! ».

Les débats seront toute la journée d’une belle intensité, couvrant les questions de stratégie et de mise en actions des équipes opérationnelles, sans oublier l’impact souhaité sur les étudiants, représentés par Jules Ferber, Vice-Président Étudiant de l’Université de Lorraine.

Mais il ne pouvait être question d’Odyssée sans aborder les rivages encore mouvants de l’intelligence artificielle. Allait-elle, sous sa forme générative, remettre en cause les progrès constatés ?

En introduction un sondage réalisé auprès du public venait confirmer d’une part qu’une majorité est déjà utilisatrice de l’IA générative et d’autre part, que cette nouvelle technologie est employée comme génératrice de contenus, de textes, d’images vidéo et de matériaux qui doivent ensuite être raffinés, pensés ou critiqués pour produire de la « connaissance ». Isabelle Blanc, administratrice ministérielle des données, des algorithmes et des codes sources au Ministère de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, rappelle d’ailleurs que « le projet PLEIADES n’incluait pas l’IA à l’origine, étant donné la récence de l’usage génératif ». Dans son propos introductif, Isabelle Blanc précise ce que nous devons avoir en tête sur la notion d’IA éthique,

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Crédit photo : Université de Lorraine

« qui doit s’attaquer aux biais culturels, sociaux, linguistiques et de préjugés en intégrant justement la diversité dans les équipes de développement et de validation des corpus d’entrainement introduits dans le système. Elle doit aussi s’attaquer au déterminisme et à la partialité, qui ont tendance à enfermer les individus dans leur propre représentation du monde et dans leurs connaissances et leur historiques préalables. Il est crucial, par ailleurs, d’avoir la confiance des utilisateurs et de garantir à la fois transparence et explicabilité dans les réponses proposées. Ce qui revient à dire qu’il faut une ouverture aux données et le respect du droit d’auteur, notamment avec la citation des sources. »

A ce stade, la question de l’intelligence des réponses fournies par l’IA générative, pose un problème de fond. Produire du contenu à partir d’un corpus de connaissances injecté dans un système informatique, est-ce vraiment intelligent ? N’est-ce pas au contraire, l’humain qui transforme ce corpus de connaissances grâce à son intelligence personnelle, unique, en quelque chose de nouveau, et par conséquent, d’intelligent ?

Mais alors, « qu’est-ce qui a favorisé l’émergence de l’IA générative aujourd’hui, alors qu’on maitrisait les techniques algorithmiques depuis plusieurs dizaines d’années ? » demande Isabelle Blanc. La masse des données disponibles, stockées et traitées par ordinateur est la réponse. Ce dont conviendront les autres intervenants du débat : Jean-Pierre Berthet, Directeur délégué au Numérique à Sciences Po, Raphaël Bary, Jérôme Dinet et Azim Roussanaly, Enseignants chercheurs à l’Université de Lorraine. L’intelligence dépendrait-elle de la qualité des informations fournies au départ, à notre cerveau comme à un système artificiel ?

L’océan de la data n’est pas du tout uniforme. Et ce que nous croyons savoir aujourd’hui, ne peut suffire à définir ce que nous devrions savoir demain. L’intelligence de l’humain est principalement caractérisée par sa capacité à créer autre chose pour demain. Une preuve nous en est donnée par Sciences Po, qui s’adresse à plus de 15 000 étudiants avec 2 500 enseignants chercheurs et plus de 4 000 intervenants, « utilisateurs de l’IA dans le plus profond respect de l’intégrité académique », comme le rappelle Jean-Pierre Berthet en préambule. « Proposer une pédagogie de l’usage de l’IA générative en direction des enseignants, demander aux étudiants de jouer le rôle de critique systématique des réponses fournies par l’IA et rappeler l’importance de la diversité des points de vue, sont des axes de réflexion que nous avons proposés à nos publics, afin de les protéger et de les inciter à conserver une certaine distance », expliquera Jean-Pierre Berthet.

En arrivant au terme de ce voyage au pays de l’IA générative, Valérie Rault, nous incite à dépasser les limites de la formation et envisager nos comportements et nos usages de la donnée en pensant à l’avenir. Car finalement, c’est tout autant « le futur de nos métiers qui dépend de ces nouvelles compétences fondamentales, que la qualité de nos vies personnelles et notre place dans la société. Alors quel est notre rôle en tant que transmetteur de connaissances et de formateur de compétences ? ».

Le projet PLEIADES et cet événement reflètent ainsi la richesse des réflexions et des itinéraires qui s’offrent à nous. Le voyage ne fait que commencer, par cette très belle Odyssée !

*ANR-21-DMES-0010

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